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Aiguèze et les vieux métiers

Béatrice Chauvin à recueilli quelques témoignages d'Aiguèzoises pour nous parler des métiers et des gens que l'on pouvait rencontrer ici il y a une cinquantaine, une soixantaine d'année...

La cloche de l’église sonne joyeusement l’angélus du matin
Il me revient en mémoire quelques petits métiers  et des cris de rues disparus. En voici quelques uns : le Caïfa, le Père Guigue, le Carl,  le Père Bertrand, l’Ase,  le marchand de peaux de lapin. le rétameur, le rempailleur, l’aiguiseur

Les épiciers : c’était le temps des  produits au détail bonbons, billes, le temps où l'épicier râpait le chocolat, mesurait le lait…


Le Caïfa venait de St Paulet de Caisson, le mercredi matin,  avec sa camionnette. Il vendait du café, marque Caïfa naturellement, de la morue sèche salée,  des pâtes, des conserves, ... le tout en petite quantité. Quel métier de galère de parcourir quinze à vingt kilomètres avec un tel chargement sur les routes accidentées et non goudronnées des environs!
Le Père Guigue, lui aussi battait la campagne, passait le mardi et le samedi matin  et offrait des articles allant de la conserve à la morue sèche salée en passant par  les savonnettes
Le Carl en plus des produits d’épicerie fine possédait un petit frigo, ce qui lui permettait de vendre du beurre et des fromages

« Alors ma petite dame, je vous en mets combien ? on imagine bien sûr le sympathique boucher Bertrand, de Saint Marcel, installé, avec son étal, dans la salle du Café Chabot remettant son crayon derrière l’oreille après vous avoir découpé votre pièce de viande.

L’Ase ou le Moci venait de Mondragon, cheminait avec son âne de village en village pour y vendre des draps, des torchons, des blouses, des culottes, des pantalons, etc. Il faisait le tour du village en criant « L ase est là » et en soufflant dans sa trompette. Plus tard la mule fut remplacée par une camionnette. Et notre septuagénaire, un peu raplot, portant casquette et pantalon de velours de quatre doigts au dessus des chevilles, disait à qui voulait l’entendre « La mule a gagné le camion et le camion mangera la baraque !... » En vieux sage, notre papé dans les années 60 allait jouait à la pétanque avec les enfants du village pendant que son épouse Maria exposait à la clientèle la couleur des draps et des torchons

Le marchand de peaux de lapin : Tout fout l’camp ! Aujourd’hui  il n’y a plus de marchands de peaux de lapin ! Il n’y a bientôt plus de lapin non plus. Par facilité commerciale, on va dire comme ça, le crabe se vend par pinces, le poulet par cuisses et le lapin par râble
Avant chaque famille élevait pour sa consommation de nombreux lapins qui faisaient souvent le repas du dimanche. Quand on tuait un lapin, il était dépecé, sa peau retournée et mise à sécher. Tous les 2 ou 3 mois, le marchand de peaux de lapin au bagout de première catégorie, muni d’un vélo et d'un petit grelot passait en criant  d’une voix forte et tonitruante : Pèu de lèbro, pèu de lapin...  Pèu de lèbro, pèu de lapin...,.
Avec lui arrivait une forte odeur de sauvagine et de vieille graisse dont l'individu était imprégné et que le chien de la ferme détectait bien avant son arrivée dans la cour ! Une peau de lapin se vendait de 10 à 15 sous, selon l'épaisseur, la grandeur, la couleur.  Il estimait les peaux en les palpant, en tirant sur le poil, en ajoutant souvent : "Hum ! ça n'vaut pas grand chose tout ça !". Après une longue discussion, il ficelait les peaux sur le porte bagage,  buvait un coup gnole, friand des derniers potins et reprenait sa route en criant: Pèu de lèbro, pèu de lapin... Pèu de lèbro, pèu de lapin...
Il fut remplacé par la Pascalette, qui ayant  un abattoir à Gairidel et un étal aux Halles de Nîmes passait de ferme en ferme pour y ramasser les œufs, le fromage, les lapins, la volaille, les chevreaux et les peaux de lapins séchées
Que faisait-on avec ses peaux de lapins : elles étaient revendues à des tanneurs qui les travaillaient et les transformaient en belles vestes, manteaux ou bonnets pour l'hiver. A cette époque, il y avait déjà le recyclage !!!

Le rétameur passait deux fois par an. Petit retour en arrière: l'alu et l'inox étaient inconnus, seules étaient utilisées les casseroles en fer étamé, parfois un chaudron en cuivre. Les fourchettes les cuillères étaient en étain, inutile de dire qu'elles se tordaient facilement, il fallait donc les remplacer. Le rétameur installé sur la place de l'église récupérait les morceaux gardés précieusement et les faisait fondre. Liquéfié, l'étain était versé dans des moules et chacun récupérait des cuillères neuves. C'est également dans cet étain liquide qu'il trempait les casseroles qui ressortaient brillantes.

« Rempailleur de chaises, voilà l'rempailleur! ». Il s'installait devant la maison et reprisait dossiers et fonds de chaises. Il ne voyait le monde que de dos ou par derrière, ce qui ne l'empêche pas de gagner sa vie en mettant les autres sur la paille!

“rémouleur, rémouleur, repasse couteaux ! repasse ciseaux..." criait l’amoulaire en poussant sa carriole ou  était fixée une meule ... le rémouleur proposait son travail d'affûtage aux villageois pour tous les instruments coupants : couteaux, ciseaux, hachoirs, serpes, faucilles, haches, etc. Il exécutait sa tâche, souvent entouré par les enfants du village ébahis